Le centre, la République en a besoin et personne n'en est propriétaire.
Publié le 04 octobre 2007
Par Hervé de Charette, Claude Goasguen et Alain Lamassoure
La République a besoin du centre. Il en est ainsi depuis toujours. Valéry Giscard d'Estaing, Jean Lecanuet et Raymond Barre ont marqué son histoire récente. On leur doit trois propositions majeures : le projet européen, l'exigence libérale aussi bien dans l'ordre politique que dans le domaine économique, l'ambition sociale exprimée comme un humanisme.
Pourtant, après le départ de M. Giscard d'Estaing, l'UDF, faute de leadership, s'est déchirée et a éclaté. Malgré diverses tentatives, personne ne s'est trouvé en capacité de reprendre l'héritage. La création de l'UMP, le refus de François Bayrou d'y contribuer et le choc de l'élection présidentielle de 2007 ont achevé le morcellement et la destruction de l'UDF. Désormais, le centre est réduit à une diaspora où les responsables politiques sont dispersés, les uns à l'UMP, les autres au MoDem, d'autres encore au Nouveau Centre, d'autres enfin nulle part.
Cette situation est négative pour notre vie politique. Au moment où le président de la République engage avec courage les réformes dont la France a besoin, nous affirmons qu'il aura besoin d'un centre retrouvé et rajeuni pour ne pas rater ce moment d'exception où le pays paraît prêt à accepter de réels changements.
Plus que jamais, les valeurs fondatrices de l'UDF s'imposent à nous : la France a besoin d'entrer enfin dans l'économie de l'entreprise, de la concurrence et de l'intelligence ; elle a besoin de forger les consensus qui constitueront notre futur modèle social ; enfin, elle a besoin d'un projet européen ambitieux et innovant.
Nous avons plusieurs convictions à l'esprit :
1. L'UDF a donné à notre pays un président de la République, un premier ministre, de nombreux maires de grandes villes, présidents de conseils généraux et régionaux, un très grand nombre de parlementaires. Nul ne peut s'en arroger la propriété solitaire. C'est un patrimoine collectif dont nous sommes tous responsables. Nous ne sommes pas disposés à le laisser tomber dans les oubliettes de l'histoire et nous n'imaginons pas que l'UDF s'abandonne à devenir une simple composante du MoDem. Nous affirmons notre refus de voir cet héritage disparaître de la vie politique française.
2. Une partie d'entre nous a contribué à la création de l'UMP. Les mêmes n'oublient pas que Nicolas Sarkozy ne fait pas mystère qu'il ne souhaite pas s'enfermer dans une structure unique de la droite et du centre. Cela nous conforte dans la conviction que, dans la période nouvelle qui s'ouvre, le centre doit à nouveau s'affirmer et apporter sa contribution propre et originale au relèvement de notre pays.
3. Les héritiers de l'UDF doivent respecter leurs différences et la diversité de leurs parcours. Nous ne cherchons donc pas à créer une nouvelle formation politique. Il ne s'agit pas de reconstituer l'UDF sur ses bases anciennes. Notre projet vise à ouvrir un espace politique de rencontre et de dialogue au sein de la majorité présidentielle.
4. Avec François Bayrou, nous avons tous fait une partie du chemin, même si nous avons souvent eu des différends. Il ne saurait prétendre au monopole de l'héritage de l'UDF, mais nous ne lui contestons pas sa part de responsabilité et la place qui lui revient. C'est pourquoi nous voulons l'associer à nos réflexions.
5. Il y a, d'évidence, un débat sur les alliances. Pour nombre d'entre nous, la pensée politique de l'UDF en fait le partenaire naturel de la droite. C'est le chemin suivi depuis l'origine. Pour d'autres, notre famille doit rester libre de ses alliances et pouvoir coopérer avec la gauche comme avec la droite. Nous suggérons de laisser cette question ouverte. Dans l'espace politique que nous ouvrons, le libre débat et la confrontation des idées auront toute leur place.
Sur la base de ces quelques principes, nous entendons travailler au rassemblement de ceux qui ont constitué hier la famille UDF pour occuper, ensemble, l'espace politique qui nous permettra d'exprimer nos valeurs et nos convictions dans ce moment décisif où la liberté et l'originalité qui nous caractérisent depuis toujours sont indispensables à la vie politique du pays.
Nous sommes sans arrière-pensée. Nous n'agissons pour le compte de personne. Nous voulons surmonter les divisions d'hier et d'aujourd'hui pour que le centre apporte sa pierre - qui est une pierre angulaire - à l'oeuvre de redressement de la nation. Voilà pourquoi nous faisons appel à toutes les bonnes volontés et nous proposons, dans un premier temps, l'organisation prochaine d'un grand forum de débat ouvert à toutes les personnes et sensibilités qui se revendiquent du centre et dont le thème sera : « l'UDF d'hier et de demain : quelle place pour le centre dans la vie politique française ? »
* Ont également signé cette tribune JEAN-MARC NESME, YVES POZZO DI BORGO, PIERRE-ANDRÉ WILTZER, JEAN-PIERRE DUCLOS, ÉRIC HELARD et PATRICK TRÉMÈGE